1996 à nos jours (L’histoire de RFI)

1996 : Face à la concurrence, le passage au Tout Actu

Alors que l’URSS s’effondre, les pays africains entament une ère de libéralisation et de démocratisation. RFI a enfin des concurrents : il faut abandonner la position lointaine de radio internationale, se placer au plus proche des gens, où qu’ils soient, pour séduire de nouveaux auditeurs. Après Dakar, Cotonou, Ouagadougou, Abidjan, Djibouti, la radio diffuse désormais dans 120 villes en FM. Pour s’adapter à la concurrence, conserver les anciens fidèles et conquérir la jeunesse urbaine africaine, un nouveau plan d’objectif est adopté : renforcer le réseau international de correspondants, et proposer une information rapide et diversifiée. Dans le sillage de la refonte médiatique d’alors, et face au succès de France Info, dont les formats, à l’époque, sont très courts, en 1996 RFI opère encore une fois sa mue. L’heure du « Tout Actu » a sonné.

De 18 à 58 journaux d’information par jour : la course à l’info commence !

Si on décide de conserver les magazines, leur format est modifié : il passe d’une heure à 20 minutes. RFI se spécialise dans l’actualité. Finie, la radio généraliste. De 18 journaux d’informations par jour, la radio en propose désormais 58, dont dix sont exclusivement réservés à l’actualité africaine. Il faut apprendre à maitriser le temps, et développer de nouveaux rendez-vous, au plus proche du public, dans des formats plus concis. L’émission participative Appels sur l’Actualité, présentée par Juan Gomez, est créée, le  « journal en français facile », pour francophones et francophiles, aussi. Il est accompagné du développement des méthodes d’apprentissage du français par une équipe dédiée de spécialistes du FLE (français langue étrangère). Comme disent certains auditeurs : « RFI, c’est la radio qui forme et informe ».

Par la multiplication des supports, des formats, des correspondants, il s’agit de donner une image objective de l’Afrique, au-delà des problèmes économiques et financiers rencontrés par de nombreux pays. Le nouveau directeur, Jean-Paul Cluzel, parle de « réalité réelle » : l’agriculture, la musique, la démocratisation, les villes et les campagnes doivent être racontées au quotidien. On rachète aussi RMC Moyen-Orient qui diffuse ses programmes en arabe. Avec elle, RFI revendique 45 millions d’auditeurs, entre l’Afrique francophone et le Moyen-Orient, l’Europe et l’Asie. La guerre des Balkans éclate, des messages sont diffusés chaque jour à destination des réfugiés par la rédaction albanaise, lancée en 1999.

Adieu, Maison de la radio, bonjour Issy-les-Moulineaux

Mais la Chute du mur et la libéralisation du bloc de l’Est changent le monde et RFI s’adapte encore une fois à la géopolitique : en 2009, six rédactions en langues sont fermées, l’allemand, l’albanais, le turc, le slave du sud -à destination de l’ancienne Yougoslavie- le lao et le polonais. Un plan social d’ampleur, puis un second, sont mis en œuvre, déclenchant de grandes grèves. Après un plan de départs volontaires, RFI perd 20% de ses effectifs, mais conserve ses missions.

En 2012, l’histoire s’accélère une nouvelle fois : la fusion avec France 24, télévision publique internationale voulue par Jacques Chirac, est actée. Le groupe AEF, pour Audiovisuel Extérieur de la France, bientôt renommé France Médias Monde, les réunit avec la radio en arabe Monte Carlo Doualiya, sous la présidence direction générale de Marie-Christine Saragosse. En 2013, nouveau déménagement : RFI quitte l’emblématique Maison de la radio, au grand dam de certains salariés, pour rejoindre l’immeuble d’Issy-les-Moulineaux où France 24 est déjà installée. Des liens se tissent peu à peu entre les rédactions. La rédaction latino-américaine de RFI participe ainsi à FMM Latina, la version en langue espagnole de France 24. De nouveaux programmes en langues africaines sont créés. Des équipes à Nairobi, Lagos et Dakar parlent en swahili, en haoussa, en mandenkan et en fufulde.

Avec les ondes courtes, mais aussi la FM, le câble et le satellite, maintenant le DAB+, l’information arrive désormais partout. De son côté, le site Internet est lancé en 1997 et se dote d’une rédaction dédiée. C’est une démarche pionnière, rapidement récompensée par un « Clic d’Or », reçu en 2004. Les rédactions en langues étrangères passent progressivement au numérique. La radio n’est plus seulement une radio : elle devient un média global. Les réseaux sociaux arrivent aussi avec YouTube, Facebook, Instagram mais aussi des podcasts et des émissions filmées. Il faut être présent partout, et plus seulement sur les ondes. RFI relève le défi du XXIème siècle et devient plurielle par ses modes d’expressions et ses formats. Ses auditeurs l’étaient déjà. C’est pour eux que toute l’énergie et les compétences sont dépensées quotidiennement. 

Sur le terrain les risques évoluent, les drames touchent RFI
La rédaction de RFI a payé très cher sa mission d’information en perdant tragiquement plusieurs consœurs et confrères. Deux mois à peine après le 11 septembre 2001, une de ses journalistes, Johanne Sutton, meurt en Afghanistan dans une embuscade menée par les talibans. Elle sera suivie, en 2004, par Jean Hélène, assassiné en Côte d’Ivoire par un policier. Il était l’un des premiers journalistes à avoir alerté sur le déclenchement du génocide rwandais. Tous les correspondants de RFI lui rendent hommage, en signant de son nom leurs reportages envoyés du monde entier. Boris Fleuranceau décède en 2007 d’une violente crise de paludisme, à l’âge de 35 ans, après avoir contracté la maladie lors de ses missions en Afrique. En 2013, les journalistes et techniciens Ghislaine Dupont et Claude Verlon sont tués au Nord du Mali, après avoir été pris en otage. Les journalistes sont désormais pris pour cible : ils deviennent, contre leur gré, des acteurs exposés et non plus de simples observateurs des évènements. RFI est une radio, un média, ancré à l’international. Lors de ces événements douloureux, les hommages des auditeurs affluent du monde entier, témoignages des liens fraternels qui se sont tissés au fil des ans. Face au risque accru et mouvant, les formations à la sécurité en zones dangereuses et les dispositifs « d’arrimage » des équipes de reporters se mettent en place au sein de France Médias Monde et bénéficient aujourd’hui très largement aux professionnels du secteur.